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[1970] R.C.A. SUMITOMO SHOJI KAISHA v. FIRST STEAMSHIP 763 [TRADUCTION} Ministre du Revenu national (Appelant) v. La Succession Zachariah (Intimée) Le juge WalshQuébec, le 24 septembre; Ottawa, le 8 octobre 1970. Impôt sur les biens transmis par décèsFonctionnaire de l'Organisation de l'aviation civile internationaleExemption d l'égard d'un bien acquis eaux fins de résidence ou accessoirement d cette résidence» au CanadaInvestissements provenant d'épargnesLoi de l'impôt sur les biens transmis par décès, 1958, c. 29, art. 35(2)(b). L'article 35(2)(b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès exempte de l'impôt successoral tous biens acquis par une personne taux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence, en qualité de fonction-naire ou d'employé de» certaines organisations internationales. Z, de nationalité indienne, a été employé de 1950 à 1965 comme vérificateur interne par l'Organisation de l'aviation civile internationale à Montréal. A son décès survenu à Mont-réal en 1965, sa succession a été cotisée aux fins d'impôt successoral sur des obligations d'épargne évaluées à $42,796.00, un compte d'épargne de $3,136.00 dé-posé dans une banque de Montréal et 100 grammes d'or évalués à $124.38, mais non sur d'autres biens situés au Canada évalués à $23,389.00, y compris un second compte d'épargne de $3,424.17 et déposé dans une banque de Montréal. Tous ces biens ont été acquis par Z grâce aux épargnes réalisées sur son salaire. Jugé: La cotisation est confirmée. Les biens cotisés n'avaient pas été acquis par Z taux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence en qualité de fonctionnaire ou d'employé» de l'Organisation de l'aviation civile inter-nationale. Il faut distinguer les biens acquis par un diplomate en rapport avec sa résidence au Canada et lui permettant d'y conserver un niveau de vie convenable, des biens acquis dans l'exercice de sa liberté d'action par d'investissement d'excé-dents. monétaires. APPEL de la Commission d'appel de l'impôt. A. Garon, c.r., et G. J. Rip, par l'appelant. B. Verchère, pour l'intimée.
[1970] R.C.E. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 765 LE JUGE WAI,sHLa présente affaire est venue à l'audience sous la forme d'un mémoire spécial comportant une question de droit, la décision qui en sera rendue, aura pour effet de régler le différend. Selon les faits énoncés dans le mémoire spécial, feu Cunnumparathu Abraham Zachariah, (ci-après ap-pelé le «de cujus») est décédé le 17 juillet 1965, à Ville Mont-Royal (Québec). Il avait de 1950 à 1965 travaillé en qualité de vérificateur interne à l'Organisation de l'aviation civile internationale à Montréal il était tenu de résider de par ses fonctions. Toutefois, il était de nationalité indienne et domicilié en Inde. A sa mort, il a laissé un héritage dont la valeur globale nette s'élevait à $83,794.30 selon la déclaration datée du 5 novembre 1965, qu'a déposée son épouse. Le ministre a imposé certains éléments de l'avoir: Catégorie D $14,000 Obligations d'épargne du Canada à 5% et intérêts courus $14,466.76 Catégorie D $ 2,000 Obligations d'épargne du Canada à 41% et intérêts courus 2,060.00 Catégorie D $11,000 Obligations d'épargne de la province de Québec à 51% et intérêts courus 11,144.38 Catégorie D $15,000 Obligations d'épargne du Canada à 5% et intérêts courus 15,125.10 Catégorie E Compte d'épargne n° 12909, à la Banque de Montréal (Montréal) 3,136.91 Catégorie E Un lingot d'or de 100 grammes 124.38 $46,057.53 Les biens suivants qui se trouvaient au Canada n'ont pas été inclus dans l'actif imposé: Catégorie E Compte d'épargne à la Banque Royale du Canada (Montréal) $ 3,424.17 Catégorie E Vêtements, bijoux et effets personnels 200.00 Catégorie E Équipement ménager, ameublement et effets personnels 1,000.00 Catégorie E Jours de congé accumulés, allocation de séjour, indemnités etc., de l'Organisation de l'aviation civile internationale 18,765.60 $23,389.77 Tous les biens imposés, à l'exception des intérêts courus, ont été acquis avec des fonds que le de cujus avait épargnés sur le revenu qu'il avait gagné en qualité de fonctionnaire de l'Organisation de l'aviation civile internatio-nale à Montréal, organisation répondant aux critères d'application de la Loi sur les privilèges et immunités des Nations Unies, conformément à l'article 35(2)b) de la Loi sur les biens transmis par décès. Dans sa déclaration
[1970] R.C.E. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 767 d'impôt sur les biens transmis par décès, la veuve du de cujus a prétendu que la succession bénéficiait de l'exonération fiscale puisque la majeure partie de l'avoir, constituant la succession, a été acquise par le de cujus: ... aux fins de résidence au Canada, ou accessoirement à cette résidence, en qualité de fonctionnaire de carrière de l'Organisation de l'aviation civile inter-nationale étant tenu par ses fonctions de résider au Canada en vertu des dispositions de l'article 35, paragraphe (2), alinéa b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès. Par un avis de cotisation en date du 17 mai 1968, le ministre a perçu un impôt de $6,908.63, soit 15% des $46,057.53. Par avis d'opposition déposé clans les délais prescrits, la succession a fait appel de la cotisation devant la Commission d'Appel de l'impôt qui a fait droit à l'appel par décision du 3 mars 19691 . L'appelant, en l'espèce le Ministre du Revenu national, a inter-jeté appel de cette décision le 26 juin 1969. Voici l'exposé du litige et les dispositions légales énoncées dans le mé-moire spécial: 12. En remplissant la déclaration d'impôt sur les biens transmis par décès, l'intimée a pris pour acquis que les biens imposés avaient été acquis de son vivant par le de cujus aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette rési-dence, en sa qualité de fonctionnaire ou d'employé d'une organisation, définie aux fins de l'article 3 de la Loi sur les privilèges et immunités des Nations Unies et qu'en conséquence, elle pouvait déduire dans le calcul de la valeur globale de l'avoir imposable au décès du de cujus, les biens imposés, conformément à l'article 35(2)b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès. 13. En établissant la cotisation le 29 janvier 1965, l'appelant a présumé que les biens imposés n'avaient pas été acquis par le de cujus aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence et que l'article 35(2)b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès était donc inapplicable. En conséquence, l'appelant a assujetti à l'impôt les biens transmis par décès selon l'article 34 de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès. 14. Voici les dispositions pertinentes de la Loi sur les biens transmis par décès S.C. 1958: 34. (1) Dans le cas du décès, à quelque époque après l'entrée en vigueur de la présente loi, d'une personne domiciliée hors du Canada lors de son décès, un impôt successoral doit être payé comme le requièrent les dispositions ci-dessous, sur la valeur globale de tous les biens imposables (ci-après, dans la présente Par-tie, appelés «biens imposables au décès»), soit les biens situés au Canada lors de son décès, dont la valeur, si ladite personne avait été domiciliée au Canada à son décès, devrait être incluse, selon la présente loi, dans le calcul de la valeur glo-bale nette des biens transmis lors de son décès. 35. (2) Nonobstant le paragraphe (1), (qui vise les dettes et charges mais ne s'applique pas en l'espèce), on peut déduire, dans le calcul de la valeur glo-bale des biens imposables au décès d'une personne, b) la valeur de tous biens acquis par cette personne pendant sa vie, aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence, en qua-lité de fonctionnaire ou d'employé d'une organisation, définie pour l'application de l'article 3 de la Loi sur les privilèges et immunités des Nations Unies, dont les attributions l'obligeaient à résider au Canada, si cette personne, lors de son décès, était encore tenue de résider au Ca-nada par ses fonctions en cette qualité de fonctionnaire ou d'employé. 1 [1969] Tax A.B.C. 280.
[19701 R.C.É. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 769 Il appartient à la cour de trancher la question. Le de cujus a-t-il acquis de son vivant les biens imposés aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence, en qualité de fonctionnaire ou d'em-ployé de l'Organisation de l'aviation civile internationale. Il est convenu que si la cour répond par l'affirmative, l'appel sera rejeté avec dépens, dans le cas contraire, l'appel sera accueilli avec frais et dépens. Le problème de fond est de savoir quelle signification donner aux mots «aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence». L'intimée cherche à leur donner un sens très large qui ferait bénéficier de l'exonération tous les biens acquis par le placement des fonds épargnés sur le revenu gagné au Canada, l'intimée considérant ces réserves comme «acces-soires à la résidence au Canada». L'appelant, quant à lui, demande à la cour de s'en tenir à un sens plus strict au motif que l'accumulation de ré-serves ou de placements n'est «accessoire à la résidence» dans aucun pays et qu'en prévoyant une exonération la Loi ne vise que des biens tels que maison, équipement ménager, voiture, compte courant en banque en rapport avec le niveau de vie du de cujus et d'autres biens dont aurait besoin un diplomate vivant à l'étranger. L'article 34 de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès établit l'imposition alors que l'article 35 accorde une exonération pour les biens qu'il vise. Il est bien établi en droit qu'il faut donner une interprétation stricte des dispositions d'exonération d'une loi fiscale (voir Lumbers c. M.R.N. [1943] C.T.C., à la page 290; Shaeffer Pen Co. c. M.R.N. [1953] C.T.C., aux pages 348 et 349; Clevite Developments Ltd c. M.R.N. [1961] C.T.C., à la page 151; Wylie c. Montréal [1885] 12 S.C.R., à la page 386; Toronto General Trust Corp. of Ottawa c. M.R.N. [1935] S.C.R., à la page 536). A l'appui d'une interprétation large de sa disposition d'exonération en cause, l'intimée a présenté un extrait de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques, en date du 18 avril 1961, qui a été ratifiée par décret en conseil C.P. 1966-653 et qui est entrée en vigueur le 25 juin 1966. L'article 39 (4) de ladite convention précise: 4. En cas de décès d'un membre de la mission qui n'est pas ressortissant de l'État accréditaire ou n'y a pas sa résidence permanente ou d'un membre de sa famille qui fait partie de son ménage, l'État accréditaire permet le retrait des biens meubles du défunt, à l'exception de ceux qui auront été acquis dans le pays et qui font l'objet d'une prohibition d'exportation au moment de son décès. II ne sera pas prélevé de droits de succession sur les biens meubles dont la présence dans l'État accréditaire était due uniquement à la présence dans cet État du défunt en tant que membre de la mission ou membre de la famille d'un membre de la mission. Cette disposition semble être plus libérale que celle de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès, mais plusieurs raisons lui interdisent de s'appliquer en l'espèce. En premier lieu, le Canada n'a ratifié cette convention qu'en 1966 pour entrer en vigueur le 25 juin de la même année, or le de cujus est décédé le 17 juillet 1965 et l'avis de cotisation a été établi le 17 mai 1966. En second lieu, il existait déjà un article semblable au pré-sent article 35(2)b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès (bien qu'employant en anglais le terme «incidental» au lieu de «incident
[1970] R.C.É. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 771 to») * lorsque cette loi a été sanctionnée pour la première fois le 6 septem-bre 1958; on trouvait également un article presque analogue dans l'ancienne Loi fédérale sur les droits successoraux, or le libellé actuel de l'article n'a pas été modifié après ratification par décret en conseil de la convention de Vienne, en 1966. Il est clair que le texte de cette convention ne peut primer le texte de la loi qu'on nous a demandé d'interpréter. Dans l'avis consulta-tif intitulé: «In the Matter of a reference as to the Powers of the Corporation of the City of Ottawa and the Corporation of the Village of Rockcliffe Park to Levy Rates on Foreign Legations and High Commissioners' Residences 2, le juge en chef Duff cite un passage de l'arrêt britannique Mortensen c. Peters ((1906) 8 F. (J.C.) 93, à la page 101) dans lequel Lord Dunedin, président à cette époque de la Court of Session d'Écosse déclarait: ri est constant qu'il n'existe pas une norme de droit international qui soit étrangère au droit interne d'un royaume et dont on puisse se prévaloir. Aux yeux de cette Cour, le droit international est un corps de doctrine relatif aux droits et devoirs internationaux des États que nous avons adoptés et intégrés au droit écossais. Dans l'affaire Chung Chi Cheung c. Le Roi,3 il est déclaré à la page 167 du jugement rendu par Lord Atkin: ri faut constamment garder en mémoire le fait que, du moins en ce qui con-cerne les tribunaux de ce pays, le droit international, en tout cas, ne s'applique pas sauf dans la mesure notre droit interne en a accepté et a adopté les prin-cipes. Aucune autorité étrangère ne peut imposer ses règles à l'ensemble de notre droit positif ou de notre procédure. Les tribunaux reconnaissent l'existence d'un corps de règles que les nations respectent d'un commun accord. Dans tout litige, ils essayent de déterminer quelle est la règle en vigueur et, lorsqu'ils l'ont trouvée, ils l'incorporent au droit interne, dans la mesure elle n'est pas incompatible avec les règles promulguées par les lois établies en dernier ressort par les tribunaux. Bien que l'avocat de l'intimée n'ait pas voulu affirmer que la présente. Convention l'emportait sur le texte de l'article 35(2)b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès, il a néanmoins prétendu que la signature de cette convention indiquait que, si le Canada avait voulu donner une inter= prétation restrictive au présent article, il n'aurait pas ratifié la convention de Vienne. C'est un argument plutôt faible et je ne pense pas qu'on puisse inter-préter l'intention du Parlement à l'adoption de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès, en fonction de ce qu'a pu être l'intention du pouvoir exé-cutif lorsque ce dernier a adopté plusieurs années après le décret en conseil ratifiant la convention de Vienne. Il n'appartient pas à la cour de décider s'il convient de modifier l'article 35(2)b) de la Loi de l'impôt sur les biens trans-mis par décès pour élargir l'exonération afin de donner effet à l'article 39(4) de la convention de Vienne. C'est plutôt le texte actuel de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès qu'elle doit interpréter. On a également versé au dossier un extrait de l'accord de siège signé le 14 avril 1951 à Montréal, par le Canada et l'Organisation de l'aviation civile internationale, accord qui est entré en vigueur le ler mai 1951. L'article 12j) *Dans les deux cas la traduction française a employé l'expression «accessoirement à.. (Note du traducteur). 9 [1943] S.C.R. 208. '[ 1939] A.C. 160. 93532-14
1970] R.C.E. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 773 de cet accord dispose qu'il sera accordé aux représentants des états membres, dans l'exercice de leur fonction, une exonération de l'impôt fédéral sur le revenu que le gouvernement du Canada accorde aux envoyés diplomatiques. Cet article se réfère à l'article 62 (1) de la Loi de l'impôt sur le revenu dont voici un passage: 62. (1) Aucun impôt n'est exigible en vertu de la présente Partie sur le revenu imposable d'une personne pour la période cette personne était (a) un fonctionnaire ou préposé du gouvernement d'un pays autre que le Canada, que ses fonctions obligent à résider au Canada (i) si, immédiatement avant d'assumer ses fonctions, il résidait hors du Canada, (ii) si ce pays accorde un privilège semblable à un fonctionnaire ou pré-posé du Canada de la même catégorie, (iii) s'il n'a, à aucun moment durant la période, exercé d'entreprise, de charge ou d'emploi au Canada autre que son poste auprès de ce gouvernement, , et (iv) s'il n'était pas citoyen canadien pendant la période, Voici un extrait de l'article 18 de l'accord de siège qui traite des taxes suc-cessorales et des droits de succession: Le Gouvernement du Canada ne prélèvera pas de taxes successorales ni de droits de succession sur les biens ou à l'égard des biens acquis, au cours ou à l'occasion de leur résidence au Canada, par les Représentants des Membres, qui n'étaient pas citoyens canadiens à la date de leur décès. Le Gouvernement du Canada ne mettra aucun obstacle au rapatriement des biens ainsi exonérés de taxes et de droits. On remarquera qu'on a utilisé dans cet extrait l'expression «au cours ou à l'occasion de leur résidence au Canada» qui est l'équivalent de l'expression «aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence» * * qui était utilisée dans la Loi fédérale sur les droits successoraux4 en vigueur à cette époque. L'avocat de l'intimée a prétendu que l'exonération de l'impôt sur le revenu et d'autres impôts directs tels que les droits de douanes et d'accise sur les articles importés pour l'usage personnel du diplomate ou celui de sa famille indique que l'interprétation large de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès se justifie même si l'article 35(2)b) établit une exemption fiscale. Néanmoins, je pense qu'il faut s'en tenir au fait que c'est le libellé de cet article que nous devons interpréter et que nous ne pouvons en étendre l'interprétation à d'autres biens que ceux couverts par l'expression «aux fins de résidence ou accessoirement à cette résidence». L'avocat de l'intimée a en outre prétendu que l'interprétation prônée par l'appelant laisse beaucoup à la discrétion du cotiseur et qu'aucun règlement n'a été pris en application de la Loi pour déterminer la ligne de séparation entre l'avoir à imposer et l'avoir à exonérer. Par exemple, il y avait en l'espèce deux comptes en banque, l'un portant le n° 12909 ouvert à la Banque de Montréal, d'un montant de $3,136.91 qui a été imposé et l'autre, un compte d'épargne ouvert à la Banque Royale du Canada à Montréal, d'un montant de $3,424.17 qui n'a pas été imposé. Il a laissé entendre que si toutes les épargnes du défunt avaient été placées dans un seul compte en **L'expression anglaise employée «for or incidental to residence in Canada» est la même dans les deux textes (Note du traducteur). ' S .R.C. 1952, c. 89, art. 71). 93532-141
[1970] R.C.É. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 775 banque au lieu de servir à acheter des obligations, le Ministre n'aurait eu aucun moyen de déterminer quelle partie du compte le cas échéant, il fallait imposer. L'avocat de l'appelant a prétendu que dans une telle hypothèse, on aurait considérer qu'un montant nominal raisonnable du compte était exonéré d'impôt et on aurait imposer le reliquat. Et il a soutenu que la décision d'inclure un compte en banque dans l'avoir imposé et de ne pas inclure l'autre constituait un exercice raisonnable du pouvoir d'appréciation, les deux comptes étant d'un montant équivalent, il a également prétendu que le de cujus n'avait besoin que d'un compte «accessoirement à sa résidence au Canada». La décision de la Commission d'appel de l'impôt a abordé le pro-blème de la répartition arbitraire du montant des épargnes accumulées, pour laquelle la législation n'a prévu aucun règlement particulier. Bien que ce point pose indéniablement un problème, il y a de nombreux articles tant dans la Loi de l'impôt sur le revenu que dans la Loi de l'impôt sur les biens trans-mis par décès, et dans d'autres lois fiscales qui obligent les cotiseurs à exercer un grand pouvoir d'appréciation et je crois que l'exercice de ce pouvoir est implicite dans le libellé de l'article qui exonère seulement les biens «aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence» ce qui astreint les cotiseurs à classer les biens du de cujus selon deux catégories, les biens qui tombent sous le coup de cet article et ceux qui n'y tombent pas. II me semble que le cotiseur a en l'espèce exercé raisonnablement son pouvoir d'appréciation à moins que soit confirmée la prétention de l'intimée selon laquelle doivent être exonérés tous les biens acquis au Canada par l'investisse-ment d'épargnes faites par le de cujus sur le revenu qu'il avait gagné dans ce pays. Venons-en maintenant au coeur de l'affaire, c'est-à-dire à l'interprétation qu'il convient de donner à l'expression « aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence». Aucune des parties n'a attribué dans le contexte de cette affaire une signification particulière aux mots «aux fins de», limitant ainsi leur discussion à l'interprétation qu'il convenait de donner au terme «accessoirement à». L'avocat de l'appelant a fait remarquer que lorsque la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès a été adoptée pour la première fois en 1958 6, l'article 35(2) disposait: 35. (2) Nonobstant le paragraphe (1), on peut déduire, dans le calcul de la valeur globale des biens imposables au décès d'une personne, la valeur de tous biens acquis par ladite personne pendant sa vie, aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence, en qualité de fonctionnaire ou d'employé du gouvernement d'un pays autre que le Canada, dont les attributions exigent qu'elle réside au Canada, a) si ladite personne était un citoyen ou sujet dudit pays au moment de l'acquisition des biens en question, et était encore tenue de résider au Canada, lors de son décès, par ses fonctions en cette qualité de fonc-tionnaire ou d'employé, et b) si ledit pays accorde en substance le môme allégement pour ce qui con-cerne les biens acquis par un fonctionnaire ou employé du gouvernement du Canada. 5S. du C. 1958, c. 29.
[1970] R.C.E. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 777 Les mots «accessoirement à» «.(incidental to ont également été utilisés dans la Loi fédérale sur les droits successoraux (précitée). En 1962, la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès a été amendée6 en abrogeant le para-graphe (2) de l'article 35 pour le remplacer par la rédaction suivante: 35. (2) Nonobstant le paragraphe (1), on peut déduire, dans le calcul de la valeur globale des biens imposables au décès d'une personne, a) la valeur de tous biens acquis par ladite personne pendant sa vie, aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence, en qualité de fonctionnaire ou d'employé du gouvernement d'un pays autre que le Canada, dont les attributions l'obligeaient à résider au Canada (i) si ladite personne était un citoyen ou sujet dudit pays au moment de l'acquisition des biens en question, et était encore tenue de ré-sider au Canada, lors de son décès, par ses fonctions en cette qua-lité de fonctionnaire ou d'employé, et (ii) si ledit pays accorde en substance le même allégement pour ce qui concerne les biens acquis par un fonctionnaire ou employé du gou-vernement du Canada; et b) la valeur de tous biens acquis par cette personne pendant sa vie, aux fins de résidence au Canada ou accessoirement à cette résidence, en qualité de fonctionnaire ou d'employé d'une organisation, définie pour l'application de l'article 3 de la Loi sur les privilèges et immunités des Nations Unies, dont les attributions l'obligeaient à résider au Canada, si cette personne, lors de son décès, était encore tenue de résider au Canada par ses fonctions en cette qualité de fonctionnaire ou d'employé. C'est cette loi d'amendement qui a étendu l'exonération aux agents ou em-ployés d'organisations définies pour l'application de l'article (3) de la Loi sur les privilèges et immunités des Nations Unies, catégorie dont faisait partie le de cujus. C'est également dans cette loi d'amendement que les termes «incident to» ont pour la première fois remplacé «incidental to». L'avocat de l'appelant attache une grande importance à cette modification. Il est extrême-ment intéressant toutefois de noter que la traduction française, tant de la loi primitive que de la loi d'amendement n'emploie que le mot «accessoirement» qui apparemment est la traduction interchangeable de «incidental to» et de «incident to». L'avocat de l'appelant prétend que les termes «incident to» ont un sens beaucoup plus restrictif que les termes «incidental to» et il affirme que cette modification a été faite délibérément du fait qu'on aurait pu attri-buer un sens trop large aux termes «incidental to». On remarquera cependant que ce n'est pas la seule modification apportée à cette époque à cet article de la loi, aussi est-il impossible de déclarer que cette modification a été faite dans le seul but de remplacer ces mots. Toutefois, il serait erroné de supposer que le rédacteur a apporté cette modification sans avoir un objectif précis. Par ailleurs, l'avocat de l'intimée a affirmé que le terme français «accessoire-ment» a un sens beaucoup plus large que «incident to» ou «incidental to». A l'appui de leur prétention respective, les deux parties se sont reportées aux définitions que donnaient un certain nombre de dictionnaires généraux ou juridiques. L'intimée s'est reportée aux définitions suivantes: The Shorter Oxford English Dictionary incident: susceptible de se produire ou de se passer; qui peut arriver, qui par nature se rattache à quelque chose, relatif à ou propre à. 6 S. du C. 1962-63, c. 5, art. 5.
[1970] R.C.A. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 779 Funk and Wagnall Standard College Dictionary incident: quelque chose qui dépend par nature ou juridiquement d'une autre chose ou qui s'y rattache. Bouvier's Law Dictionary incident: ce terme s'emploie comme substantif et comme adjectif pour désigner une chose qui, soit par habitude, soit par nature, dé-pend intrinsèquement d'une autre chose qui a plus d'importance, qui en relève ou la suit. lowitt's Dictionary of English Law incident: une chose qui vient avec ou après une autre. Webster's Third New International Dictionary incident: qui se produit ou peut se produire comme par exemple une conséquence mineure ou un événement secondaire associé à ou lié par nature, ou se rattachant; qui dépend ou relève d'une autre chose; qui se rattache directement ou fait partie d'une autre chose tout en n'étant pas un élément essentiel de cette dernière. Larousse Universel accessoire: qui accompagne une chose principale; qui n'a qu'une importance secondaire. accessoirement: d'une manière accessoire. L'avocat de l'appelant, quant à lui, s'est référé aux définitions suivantes: Standard Dictionary of the English Language incident: quelque chose qui survient au cours d'une entreprise ou en relation avec un événement. Quelque chose qui de façon ca-ractéristique naturelle ou juridique dépend de ce qui est principal, s'y rattache ou y est contenue; susceptible de se pro-duire, qui par nature ou habitude vient avec quelque chose ou l'accompagne. incidental: qui arrive sans régularité ni but; fortuit; événement, incident, contingent ou fortuit, événement, circonstance ou conséquence secondaire ou subsidiaire. Stroud's Judicial Dictionary of Words and Phrases incident: incidental. Une chose est `incident» à une autre lorsqu'elle vient avec ou après cette autre chose plus importante ou principale. Webster's Third New International Dictionary of the English Language incident: quelque chose qui dépend, relève ou est subordonné, accom- pagne quelque chose d'autre d'une importance plus grande ou principale; quelque chose qui provient ou qui résulte de quel-que chose d'une importance plus grande ou principale. incidental: subsidiaire, non essentiel ou qui accompagne en place ou en importance; qui se produit par hasard, sans but ni calcul; évé-nement concomitant de peu d'importance. Shorter Oxford English Dictionary incident: événement accessoire ou subsidiaire . ; circonstance accessoire. incidental: qui se produit ou peut se produire fortuitement ou subsidiaire- ment par rapport à une autre chose. Circonstance incidente. Nouveau Larousse Illustré accessoire: qui se rapporte à une chose principale, qui s'y rattache, s'y unit, sans être essentiel à cette chose.
[1970] R.C.É. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 781 accessoirement: d'une manière accessoire. Dictionnaire Alphabétique et Analogique accessoire: qui s'ajoute comme un accompagnement, une suite ou une dépendance, à la chose principale. C'est dans le Brown's New Law Dictionary qu'on trouve l'une des défi-nitions les plus significatives: Cette expression s'emploie dans son sens correct, pour désigner quelque chose qui appartient de manière inséparable, est reliée ou est inhérente à une autre chose qu'on appelle la chose principale. Le Fowler's Dictionary of Modern English Usage précise au sujet des termes «incident» et «incidental» : ...; le terme «incidental» s'applique à des événements secondaires tout en insistant sur leur indépendance à l'égard de l'entreprise principale, tandis que le terme «incident» implique que bien que non essentiels à l'entreprise principale, ces événements ne surgissent pas par hasard en relation avec elle mais qu'on peut s'attendre à les voir surgir. A l'examen de ces définitions, il apparaît juste de dire que «incident to» a un sens plus restrictif que «incidental to» ou quaccessoirement» (bien qu'il faille de nouveau souligner que le terme «accessoirement» est encore utilisé dans la version française du texte actuel de la loi). Même s'il pouvait être exagéré de juger que les biens devaient nécessaire-ment être acquis par la résidence au Canada pour bénéficier de l'exonéra-tion, il est certain que ces deux dernières définitions conduiraient à une inter-prétation quelque peu restrictive des termes «accessoirement à la résidence». Selon la définition que donne le Brown's New Law Dictionary, il faudrait que 1' (les) investissement(s) «appartienne(nt) de manière inséparable, soit (soient) lié(s) ou inhérent(s) à» la résidence du de cujus, tandis que, selon la définition que donne le Fowler's Dictionary of Modern English Usage, il faudrait que les investissements «ne surgissent pas par hasard du fait de cette dernière (entreprise principale) mais qu'on peut s'attendre à les voir surgir». La Commission d'appel de l'impôt a déclaré dans sa décision (à la page 11 des documents, Pièce R-1) : . Les épargnes constituaient une suite logique à sa résidence au Canada, en qualité d'employé ou de fonctionnaire d'une organisation internationale et n'étaient nullement incertaines ou fortuites du fait de cette résidence. Je ne puis souscrire à cette déclaration. Il est indéniable que les épargnes se sont accumulées en raison de la résidence du de cujus au Canada et pro-venaient du revenu gagné mais je ne suis pas d'accord lorsqu'il est dit qu'elles n'étaient pas «incertaines ou forfaites du fait de cette résidence». Un diplo-mate qui réside au Canada ne peut acquérir des biens que dans la mesure né-cessaire au maintien d'un niveau de vie correspondant à sa position et sa situation sociale et il peut dépenser le reste de son revenu ou l'investir dans son propre pays ou ailleurs à l'étranger tandis qu'un autre, comme par exemple le de cujus en l'espèce, pourrait vivre plus modestement, épargner
[19701 R.C.É. M.R.N. v. SUCCESSION ZACHARIAH 783 de l'argent et montrer sa confiance dans le pays il réside en y investissant. Tout en le louant pour ses décisions, il me semble que l'accumulation des épargnes et des investissements est une question de choix personnel ou d'habitude qui n'est pas «accessoire» à la résidence dans un lieu donné. Interpréter d'une manière différente la mesure d'exonération équivaudrait à exonérer tous les biens acquis grâce aux épargnes et aux investissements de revenus gagnés au Canada, auquel cas les seuls biens qui ne seraient pas exonorés seraient peut-être les biens hérités ou possédés par le diplomate avant de résider au Canada et qui n'y ont pas été apportés du fait de cette résidence. Ce n'est pas ce que stipule la loi et je ne crois pas que l'on puisse l'interpréter dans ce sens. Bien que j'estime qu'il faille donner une interpré-tation généreuse de la disposition d'exonération, il faut tracer une ligne de démarcation entre les biens acquis par utilité, par un diplomate du fait de sa résidence au Canada, pour lui permettre de maintenir un niveau de vie ap-proprié, et les biens qui ont été acquis grâce à des investissements, en prenant librement la décision d'investir des excédents monétaires. Je réponds donc par la négative à la question posée et il est fait droit à l'appel. Étant donné qu'il semble que ce soit la première affaire de cette espèce, concernant l'interprétation de l'article 35(2)b) de la Loi de l'impôt sur les biens transmis par décès et que l'intimée avait obtenu gain de cause devant la Commission d'appel de l'impôt, j'étais enclin à exempter l'intimée de l'obligation de verser les dépens du présent appel. Toutefois, l'alinéa 17 du mémoire spécial qu'ont présenté les parties indique clairement que si la Cour répondait par la négative à la question de l'alinéa 15, ce que j'ai fait, l'appel serait accueilli avec frais et dépens; je ne pense pas devoir modifier cet accord. A l'audience, les avocats des deux parties s'étaient mis d'accord pour fixer les dépens à $600 quelle que soit l'issue de la cause. Je les ai donc fixés à ce chiffre.
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