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138 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. Alexander (Appelant) v. Le Ministre du Revenu National (Intimé) Présent: Le Président Jackett Toronto, les 9, 10 et 11 décembre 1969. Impôt sur le revenuCharge ou emploi Radiologue faisant office de chef du départe-ment de radiologie d'un hôpitalContrat de travail ou contrat de louage de services—=Charge=, «Fonctionnaire», significationLoi de l'impôt sur le revenu, art. 139(1)ab). En vertu du contrat passé avec un hôpital de Trenton (Ontario), l'appelant faisait dans cet établissement office de radiologue professionnel et de directeur administratif du département de radiologie, dont le personnel se composait de six employés de l'hôpital. Les factures correspondant aux services du départe-ment étaient expédiées par l'hôpital et la rémunération de l'appelant était établie d'après les tarifs de l'Ontario Medical Association, réduits de 5% pour les comptes non perçus. Lorsqu'il était en vacances, le contrat l'obligeait à trouver un radiologue professionnel suppléant pour le remplacer. L'hôpital ne le considé-rait pas comme employé pour les fins de sa pension et de l'impôt sur son revenu. Ses tâches administratives étaient de même nature que celles accomplies gracieuse-ment par les chefs des départements de chirurgie, de médecine et d'obstétrique de l'hôpital, qui tous étaient des praticiens généralistes. Jugé: le contrat était un contrat de louage de services, et non un contrat de travail en vertu duquel l'appelant aurait été un préposé ou employé. L'appelant gagnait son salaire en exerçant une profession; cette . rémunération constituait donc le revenu d'une entreprise, et à ce titre ne bénéficiait pas uniquement des déductions applicables au revenu provenant d'une charge ou d'un emploi aux termes de l'article 5 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Jugé aussi, les frais d'automobile encourus par l'appelant à l'occasion des déplacements effectués entre son domicile, situé à Trenton, et l'université Queen's, située à Kingston et oh avaient lieu les séminaires qu'il suivait pour se tenir au courant des développements de la science radiologique, étaient déductibles dans le calcul de son revenu provenant de sa profession, nonobstant l'article 12(1)a). Semble: l'appelant n'était pas «fonctionnaire» au sens de l'article 139(1) (ab), qui s'applique uniquement lorsqu'une personne a été nommée, élue ou désignée de quelque manière que ce soit à un «poste» pré-existant donnant droit à «un traitement ou rémunération déterminée ou constatable ...N . Renvoi: Ready Mixed Concrete (S.E.) Ltd v. Minister of Pensions [1968] 1 All E.R. 433. APPEL en matière d'impôt sur le revenu. W. Z. Estey, c.r., avocat de l'appelant. M. J. Bonner, avocat de l'intimé. LE PRÉSIDENT JACKETT: Il s'agit en l'espèce d'appels des cotisations de l'appelant établies en vertu de la Partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'impositions 1964 et 1965. Les parties ont produit un document par lequel elles se sont mises d'accord sur la principale question que doit trancher le tribunal relativement à cet appel. Il me paraît en ressortir que cette question est en fait de savoir si le contrat en vertu duquel l'appelant a travaillé pour le Trenton Memorial Hospital en 1964 et 1965 était un contrat de travail, de sorte que ce qu'il recevait de l'hôpital en vertu du contrat représentait la rémunération d'une
140 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. charge ou d'un emploi, ou un contrat de louage de services, auquel cas les sommes ainsi reçues représenteraient les honoraires perçus à l'occasion de l'exercice d'une profession, et donc les revenus d'une «entreprise» au sens donné à ce terme par la Loi de l'impôt sur le revenu. (Si les sommes en question représentent la rémunération. d'une charge ou d'un emploi, les déductions pouvant être effectuées dans le calcul du revenu aux fins de la Partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu sont limitées comme il est précisé à l'article 5 de la loi. Si au contraire elles représentent les revenus d'une «entreprise», ces déductions ne sont pas limitées.) Si l'on s'en rapporte à l'accord précité, deux questions subsidiaires se poseront ensuite; chacune surgira selon qu'il sera répondu à la question principale d'une manière ou d'une autre. A mon avis, il n'y a pas lieu, en l'espèce, même si l'appelant n'était pas engagé en vertu d'un contrat de travail et n'était donc pas un employé ou préposé, de se demander s'il était néanmoins un «fonctionnaire», par le fait qu'il détenait une «charge», selon la définition que donne de ce mot l'article 139(1)ab) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui précise que: 139. (1) Dans la présente loi, * * * ab) «charge» signifie le poste d'un particulier lui donnant droit à un traite-ment ou rémunération déterminée ou constatable et comprend une charge judiciaire, la charge d'un ministre de la Couronne, d'un membre du Sénat 'ou de la Chambre des communes du Canada, d'un membre d'une assemblée législative, d'un sénateur ou membre d'un conseil législa-tif ou exécutif et toute autre charge dont le titulaire est élu par vote populaire ou est élu ou nommé à titre représentatif, et comprend aussi le poste d'administrateur de corporation; et l'expression «fonctionnaire» signifie une personne détenant une telle charge; A mon avis, cette définition s'applique uniquement ,à une personne qui a été nommée, élue ou autrement désignée à un «poste» préexistant, auquel est attaché «un traitement ou rémunération déterminée ou constatable». Rien, en l'espèce, ne prouve l'existence d'un tel «poste», de même qu'il n'existe aucun acte par lequel l'appelant serait devenu détenteur d'une telle charge. Il s'agit ici d'un contrat en vertu duquel l'appelant fournit certains services en contrepartie d'une rémunération, et donc, à mon avis, soit d'un contrat de travail conférant à l'appelant la qualité de préposé ou d'employé, soit d'un contrat de louage de services. Cela ne veut pas dire qu'il ne puisse pas y avoir nomination à une charge en plus d'un tel contrat, mais on n'a pas fait en l'espèce la preuve d'un tel état de choses. Le contrat en vertu duquel l'appelant a fourni les services en question pendant les années 1964 et 1965 est daté du 15 février 1964 et précise, dans sa partie introductive, qu'il a été passé entre le Trenton Memorial Hospital et «le docteur Alexander, radiologue et directeur du département de radiologie», désigné quelquefois dans le contrat comme «le radiologue». Les dispositions de fond du contrat précisent que: 1.1 Lorsqu'il est fait mention de «l'Hôpital» dans les dispositions ci-après, il faut entendre que les pouvoirs et obligations de «l'Hôpital» en vertu de ces dispositions sont les devoirs et obligations du Bureau des gouverneurs. 1.2 «L'administrateur» désigne l'administrateur de l'hôpital. «Le départe-ment» désigne le département de radiologie.
142 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. 1.3 Le département de radiologie est constitué du «radiologue», des employés assurant le fonctionnement des services radiologiques, et de ceux dont les activités s'apparentent à ces services et qui ont été placés sous la surveillance du directeur du département de radiologie par l'administrateur de l'hôpital. 1.4 Les parties reconnaissent conjointement que les devoirs et responsabilités du «radiologue» et du «directeur du département de radiologie» présentent trois aspects différents. Le radiologue est responsable de l'interprétation des films et du rapport au médecin traitant sur les conclusions radiologiques. Il est également chargé de donner des consultations sur l'organisation et les méthodes du départe-ment de radiologie. En tant que «directeur du département de radiologie», le radiologue est le principal responsable du service de radiologie et assume à ce titre toutes les charges administratives en découlant. 2.1 «Le radiologue» fait partie du personnel médical de l'hôpital et a toutes les responsabilités et privilèges attachés à ce titre et stipulés aux règlements de l'hôpital. 2.2 «Le radiologue» détermine l'organisation et les méthodes du département. Il doit pourvoir aux services radiologiques afin de faciliter le diagnostic et le traitement des maladies. Il surveille tout le travail de radiologie. II donne des consultations aux autres chefs de département et aux médecins non-résidents pour l'interprétation des résultats d'examens radiologiques. 2.3 Le nombre d'heures de travail par semaine correspond au temps nécessaire au bon fonctionnement du département. En cas d'urgence, «le radiologue» doit être disponible à toute heure du jour et de la nuit. «Le radiologue» s'engage à fournir des services suffisants, dans la proportion d'un radiologue à temps complet pour chaque tranche de 9,000 examens ordinaires (à l'exclusion des petites radios des poumons) effectuée dans une année. 2.4 Les vacances annuelles minimales sont d'un mois complet. «Le radio-logue» doit trouver un suppléant en son absence et est responsable des frais encourus; il doit également s'assurer de la permanence du service en son absence. 2.5 «Le radiologue» doit résider dans la ville de Trenton ou dans un rayon de cinq milles de distance. 2.6 «Le radiologue» est payé par lHôpitals pour les services de radiologie relativement aux examens effectués, conformément à l'Annexe «A». Les procédés comptables servant à déterminer le nombre d'examens accomplis doivent être confirmés de la manière établie et approuvée par lHôpital». Les avances men-suelles faites pendant l'année sont déduites de la rémunération totale et le règlement annuel comprend la somme de toutes les avances faites. Une réduction de 5% est effectuée sur la rémunération totale pour sommes non perçues. 3.1 «Le Directeur» du département de radiologie est le principal dirigeant du département, dispose à ce titre de tous les pouvoirs en découlant, est respon-sable devant ladministrateur» pour tout ce qui concerne la gestion du départe-ment de radiologie dans toutes ses activités et divisions, est soumis aux règle-ments et directives donnés par ladministrateur. au «directeur», et exerce ses fonctions dans le meilleur intérêt des malades et dans le respect strict des lois applicables, des normes des corps professionnels et des règlements de l'hôpital. 3.2 Sans restreindre la portée de l'article 3.1 de l'accord, ladministrateur» assiste le «directeur» dans l'exercice des responsabilités suivantes: 3.21 Assurer aux malades de l'hôpital le meilleur service radiologique possible. 3.22 Préparer et mettre en oeuvre des programmes d'éducation et des cours de perfectionnement, approuvés par l'administrateur, qui permettront la formation de techniciens en vue du fonctionnement d'un bon ou d'un meilleur service de radiologie. 3.23 Faire rapport à «l'administrateur» et discuter avec lui de toute affaire qui, de l'avis du «directeur», devrait être portée à la connaissance de «l'administrateur» ou être considérée par lui.
144 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. 3.24 Gérer les affaires courantes, établir le programme des activités futures du «département de radiologie», des techniciens, du personnel médical et des employés. 3.25 Coopérer avec les autres départements de l'hôpital, les aider et maintenir avec eux de bonnes relations, dans l'intérêt des malades. 3.26 Accomplir toute tâche qui, de l'accord mutuel du «directeur» et de «l'administrateur», est conforme aux meilleurs intérêts de «l'Hôpital» . 3.3 Sans restreindre la portée des articles 3 et 4 de cette convention, les obligations du «directeur» comportent notamment les suivantes. Il doit: 3.31 Soumettre à l'approbation de «l'administrateur», à la demande de ce dernier, les projets d'organisation, les propositions budgétaires et autres données administratives. 3.32 Faire des recommandations quant à l'emploi, à la surveillance et au licenciement des employés du «département». Un employé ne peut être licencié que sur décision du «directeur», confirmée par «l'administrateur». Persofine ne peut être employé sans avoir été interviewé et agréé par la direction du personnel ou par toute personne chargée par «l'adminis-trateur» d'agir au nom de la direction du personnel, et sans qu'une appréciation ait été fournie au «directeur». 3.33 S'assurer que le personnel, les fournitures et l'équipement affectés au «département» soient utilisés de manière efficace et rentable. 3.34 Conseiller «l'administrateur» sur les problèmes d'administration hospita-lière relatifs à la radiologie et l'aider dans le règlement des difficultés et l'exécution de sa tâche, comme il peut être convenu entre «l'adminis-trateur» et «le directeur». 3.4 Le Bureau des gouverneurs, sur recommandation de «l'administrateur» peut renvoyer «le directeur» et mettre fin à son contrat, si ce dernier se rend coupable d'infraction pénale, d'un acte immoral et illicite, ou d'un acte criminel, de quelque nature que ce soit, ou si après notification écrite de «l'administrateur», «le directeur» refuse de se conformer aux normes établies par ce dernier, après qu'il ait eu l'occasion de justifier sa conduite devant «l'administrateur» et le Bureau des gouverneurs ou au moins trois représentants nommés à cet effet par le Bureau des gouverneurs. «Le directeur» peut mettre fin à son contrat s'il estime que «l'Hôpital» n'en a pas respecté les termes, et sur présentation et défense de ses vues devant «l'adminis-trateur» et le Bureau des gouverneurs. 3.41 La résiliation du contrat, en vertu d'un article quelconque, entraîne l'annulation du contrat dans son entier. N'importe quelle partie au contrat peut y mettre fin à volonté sur préavis écrit de six mois. Cette notification à «l'Hôpital» peut consister en la remise de l'avis à «l'admi-nistrateur» de l'hôpital; l'avis au radiologue peut lui être donné par écrit, soit personnellement, soit par lettre recommandée adressée à son dernier domicile connu. 4.1 Ce contrat prend effet à partir du 15 février 1964 et est automatiquement renouvelé le premier janvier de chaque année, d'année en année, à moins que l'une des parties ne donne à l'autre avis de résiliation du contrat, par écrit, six mois au moins avant le premier janvier suivant, ou que ce contrat se termine autrement qu'il n'est prévu par la présente convention. Les faits importants, dans l'ensemble, ne sont pas contestés. L'administration de l'hôpital dirigeait, à tire de partie intégrante du Trenton Memorial Hospital, un département appelé «Département de radio-logié». Mis à part l'appelant, ce département se composait de quatre techniciens, d'une secrétaire médicale et d'un messager, toutes ces personnes
146 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. étant, on l'a admis de part et d'autre, des préposés ou employés ordinaires de l'hôpital. Le département de radiologie utilisait les locaux et les appareils de l'hôpital, dont ce dernier avait la charge de l'entretien; il employait également les fournitures achetées par l'hôpital. Le département procédait à l'examen radiologique aux rayons X des malades envoyés au département par leur médecin particulier; ces services étaient payables à l'administration de l'hôpital, qui recevait à cet effet, généralement d'un assureur avec qui le malade avait contracté une assurance contre ce genre de frais, les montants correspondants. Alors que les techniciens, la secrétaire et le messager constituaient le personnel de soutien du département de radiologie, l'appelant, radiologue hautement qualifié, y exerçait les fonctions principales. Tel qu'il apparaît à la lecture du contrat, il avait deux attributions. Il était directeur administratif du département et en même temps radiologue professionnel. Les examens de routine étaient généralement réalisés par les techniciens, mais l'appelant dirigeait personnellement tous les examens exigeant une compétence professionnelle; il interprétait personnellement les radios et établissait un rapport pour chaque examen, qu'il ait ou non jugé nécessaire de participer à la prise des radios. Il délibérait aussi, quand c'était nécessaire, avec les médecins traitants, et prenait à la suite du traitement toutes les mesures nécessaires au bon fonctionnement du département. En fait, la pratique médicale de l'appelant se limitait à ce qui était stipulé au contrat passé avec le Trenton Memorial Hospital.. Cependant, il semble que rien dans le contrat ne lui ait interdit de faire autrement, ou ne l'ait même obligé à consacrer une partie déterminable de son temps à ses obligations contractuelles. L'appelant n'a pas véritablement cherché à prétendre qu'en raison de la nature professionnelle du travail exigé au contrat, un radiologue n'ait pu être engagé à titre d'employé ou de préposé de l'hôpital pour faire ce travail. L'appelant soutient que, si l'on interprète correctement le contrat en question, on constate qu'il s'agit d'un contrat de louage de certains services et non d'un contrat de travail en vertu duquel il avait été employé comme fonction-naire ou préposé de l'administration de l'hôpital. Les principaux points du contrat qui ont été invoqués comme preuve qu'ils s'agissait d'un contrat de louage de certains services professionnels, et non d'un contrat de travail, en vertu duquel l'appelant avait été fonction-naire ou préposé, sont les suivants: 1. L'article 1.3 stipule que le département de radiologie se compose du «radiologue» et de certains «employés», établissant ainsi une distinction entre «le radiologue» c'est-à-dire l'appelant, et les autres membres du personnel du département, qui sont qualifiés demployés». 2. L'article 2.1 stipule que «le radiologue» fait partie du «personnel médical» de l'hôpital et a toutes les responsabilités et privilèges attachés à ce titre et stipulés aux règlements; on lui donne ainsi le même statut qu'aux médecins exerçant une pratique privée et ayant le privilège de travailler à l'hôpital. (On doit noter cependant, qu'un médecin qui, bien que chef du département de pathologie, était, de l'aveu des parties, fonc-tionnaire ou préposé de l'hôpital, faisait aussi partie du «personnel médical») .
148 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. 3. L'article 2.2 décrit les tâches du «radiologue» comme consistant à «déterminer» l'organisation et les méthodes du département, à «pour-voir» aux services radiologiques, à «surveiller» tout le travail de radio-logie et à «donner» des consultations. Bien que les termes «déterminer», «surveiller» et «donner» indiquent certaines obligations dont il doit personnellement s'acquitter, le terme «pourvoir», qui s'applique à la majeure partie du travail professionnel prévu par le contratc'est-à-dire aux services de radiologie,—semble laisser entendre qu'il n'est pas obligé de faire ce travail lui-même. 4. L'article 2.3 stipule que les heures de travail par semaine correspondent au «temps nécessaire au bon fonctionnement du département» et que «le radiologue» doit être disponible, en cas d'urgence, à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit. encore, on a manifestement évité d'imposer les heures de travail à l'appelant, tandis que l'obligation de disponibilité lui est expressément imposée. 5. L'article 2.3 stipule ensuite que «le radiologue» s'engage «à fournir des services suffisants, dans la proportion d'un radiologue à temps complet pour chaque tranche de 9,000 examens ordinaires ...effectuée dans une année», ce qui implique que si le volume de travail l'exige, l'appelant doit fournir les services de plus d'un radiologue. 6. L'article 2.4 stipule que «les vacances annuelles minimales» sont d'un mois complet et que «le radiologue» doit veiller à «trouver un suppléant en son absence», et assumer les frais encourus; il «doit s'assurer de la permanence du service en son absence». 7. L'article 2.6 stipule que «le radiologue» est payé par lHôpital» pour «les services de radiologie» relativement aux «examens effectués», conformément aux montants indiqués par l'Annexe «A» du contrat pour les «services uniquement professionnels»; il y est prévu expressément que «les tarifs seront les mêmes que ceux reconnus par l'Ontario Medical Association». Sous réserve d'une réduction de 5 p. cent pour `sommes non perçues», il semble que l'appelant soit en droit de recevoir lesdits montants à leur plein tarif, sans égard à ce que «l'Hôpital» a effective-ment perçu. En fait, il semble que l'appelant consacrait la totalité de ses activités professionnelles à l'accomplissement des obligations mises à sa charge par le contrat; cependant, pour assurer la «suppléance» pendant ses «vacances annuelles minimales» d'un mois, il avait convenu avec le radiologue d'une ville voisine de le remplacer pendant que celui-ci était en vacances, et accomplissait donc pendant cette période le travail de son collègue en plus de son travail personnel; en contrepartie, son collègue assurait, pendant ses propres vacances, l'ensemble de ses services. En fait, l'une des principales questions soulevées dans cet appel est de savoir si l'appelant est habilité ou non à déduire les frais de déplacement encourus lorsqu'il se rendait, en vertu de cet arrangement, dans d'autres localités pour effectuer le travail de son collègue. Il n'est pas non plus inutile de faire observer que si, pour des fins de pension et de déduction à la source de l'impôt sur le revenu, l'administration
150 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. de l'hôpital considérait le chef du département de pathologie comme un employé, elle ne considérait pas l'appelant comme tel pour ces fins. De même, il n'est pas sans importance, pour déterminer la nature de contrat en vertu duquel l'appelant travaillait pour le Trenton Memorial Hospital, de se rappeler que les services de caractère administratif qu'il accomplissait sont apparemment analogues, dans l'ensemble, à ceux qu'effectuent gracieusement les médecins généralistes désignés comme «Chefs» des départements de chirurgie, de médecine et d'obstétrique de l'hôpital. D'après le paragraphe 12 du règlement qui les concerne, ces «chefs» étaient chargés de «la surveillance de leurs départements respectifs». L'affaire, si l'on se place du point de vue de l'appelant, peut se résumer comme suit: l'administration de l'hôpital dirigeait un certain nombre de_ départements médicaux entièrement intégrés au fonctionnement de l'hôpital. Le personnel de soutien de ces départements était constitué d'employés de l'hôpital. A l'exception des départements de radiologie et de pathologie, les. soins médicaux dans ces départements étaient fournis par des praticiens traitant les malades individuellement et par un médecin-chef, choisi parmi ces médecins pour exercer cette fonction à titre bénévole. Cependant, en ce qui concerne le département de radiologie, en raison de la nature du travail qui y était accompli, l'hôpital assurait aux différents malades des soins complets et non pas simplement le local, l'équipement et le personnel de soutien à l'usage des médecins agréés par les malades. C'est pourquoi l'hôpital devait s'assurer les services d'un spécialiste qualifié, chargé du travail qui, dans les autres départements, était confié aux médecins choisis par les malades. C'est ce qu'on se proposait de faire, pendant les années en question, au moyen du contrat passé avec l'appelant et par lequel il acceptait non seulement de fournir ses services professionnels mais aussi de faire office de chef du département. Il fournit ces services aux mêmes conditions que s'il en avait été requis par les malades (sous réserve de la déduction de 5 p. cent). A tous égards, il a exécuté le travail professionnel pour lequel il était payé exactement de la même manière que s'il avait été appelé directement par les malades. S'il avait été appelé par les malades, il est évident qu'on se serait trouvé en présence d'un contrat de louage de services. Le fait que l'hôpital se soit entendu avec lui pour effectuer les services ne change pas la nature du contrat en vertu duquel il travaillait. Il faut admettre qu'il aurait pu assurer le même genre de services dans le cadre d'un contrat de travail, en vertu duquel il aurait été considéré comme un employé; mais compte tenu de l'esprit du contrat et de la façon dont les parties ont envisagé leurs relations contractuelles, la stipulation expresse au contrat qu'il s'engageait à assurer la «suppléance» par d'autres radiologues, non seulement pendant ses vacances mais lorsque la charge de travail dépasserait les capacités d'un seul radiologue, constitue un élément déter-minant et primordial de cette convention; celle-ci ne peut donc être qualifiée correctement que de contrat de louage de services et non de contrat de travail. L'autre conception, celle que le ministre a retenue en établissant la cotisation, peut être exposée comme suit: l'appelant occupe dans l'hôpital une situation ou un poste permanent et à temps complet. Il y a son bureau et ne possède pas d'autre cabinet. Il fait partie intégrante et essentielle du personnel de l'hôpital. Selon toute apparence, il fait partie des cadres
I52 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.CR. supérieurs de l'hôpital, au même titre que l'administrateur. Il participe à l'embauche du personnel subalterne, et en dirige les activités. Il est responsable devant l'administration de l'hôpital du bon fonctionnement de son départe-ment et doit faire travailler son département en collaboration avec les autres unités de l'hôpital. Au sens le plus communément admis du terme, l'appelant assume toutes les fonctions et responsabilités d'un cadre supérieur du personnel de l'hôpital. Les avocats des deux parties ont largement et très utilement fait mention de la jurisprudence relative à la distinction entre un contrat de travail et un contrat de louage de services. Je ne pense pas qu'il me soit nécessaire de faire au préalable état de cette jurisprudence pour parvenir à une conclusion'. Il semble évident que ce qui peut dans un cas être une façon valable d'envisager la solution du problème, n'est pas forcément utile dans un autre cas. D'une part, un contrat de travail est un contrat en vertu duquel une partie, le préposé ou l'employé, convient, pour une période déterminée ou un temps indéfini, et à temps complet ou à temps partiel, de travailler pour l'autre partie, le commettant ou l'employeur. D'une part, un contrat de louage de services est un contrat en vertu duquel une partie accepte d'effectuer pour une autre un certain travail très précis, stipulé au contrat. Un contrat de travail n'envisage ordinairement pas l'exécution d'un travail particulier mais stipule ordinairement que le préposé offre ses services au commettant pour une certaine période de temps. Un contrat de louage de services envisage ordinairement, par contre, l'exécution d'un travail ou d'une tâche nettement délimitée et n'exige ordinairement pas que le contractant exécute personnellement quelque chose. Si, en l'espèce, on avait confié à l'appelant un poste de radiologue à plein temps à l'hôpital, pour une période de temps indéterminée et à un salaire annuel, je pense que l'on ne pourrait douter qu'il ait été engagé par l'hôpital comme fonctionnaire ou comme employé. Si, par contre, l'appelant avait pratiqué la médecine de façon normale et s'était engagé à faire exactement ce qu'il était effectivement tenu de faire par le contrat, mais d'effectuer à son cabinet, quand il pourrait en trouver le temps, la partie administrative de son travail, et ce aux mêmes conditions de traitement que celles stipulées au présent contrat, je ne pense pas qu'on ait pu douter qu'il s'agissait du travail ordinaire d'un praticien, c'est-à-dire, d'un cas typique de travail effectué en vertu d'un contrat de louage de services. Dans cette jurisprudence, le problème découle du fait qu'il peut exister un contrat de travail présentant certaines des caractéristiques habituelles d'un contrat de louage de services, ou un contrat de louage de services présentant certaines des caractéristiques d'un contrat de travail. Le contrat d'engagement d'un préposé peut stipuler qu'il sera payé proportionnellement à la somme de travail qu'il accomplira, et lui laisser la charge de louer et payer lui-même les auxiliaires qui lui seront nécessaires. Voir à ce sujet le cas de la maîtresse de poste dans Reference as to the Applicability of the Minimum Wage Act of Saskatchewan to an employee of the Revenue Post Office2. Ainsi, bien qu'une personne qui passe un contrat d'entreprise con- On trouvera un sommaire récent de cette jurisprudence dans Ready Mixed Concrete (S.E. Ltd.) v. Minister of Pensions, [1968] 1 All E.R. 433, et dans Market Investigations Ltd v. Minister of Social Security, [1969] 2 W.L.R. 1, and [1968] 3 All E.R. 732. 2 [1948] S.C.R. 248.
154 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. serve ordinairement son propre lieu de travail, utilise sa propre usine et son équipement et fournisse les matériaux nécessités par le travail en question, l'un ou plusieurs de ces éléments peut être éliminé par accord spécial, sans changer la nature du contrat de louage de services. Ici, nous avons affaire à un contrat qui peut être interprété soit comme un contrat de travail avec quelques variantes par rapport au type normal, soit comme un contrat de louage de services avec également quelques variantes. Je dois donc rechercher un élément qui permette de déduire sa véritable nature. D'une part, les fonctions remplies par l'appelant en tant que directeur administratif du département poussaient à le considérer comme cadre supérieur de l'hôpital. A mon avis, cependant, cet élément est compensé dans une large mesure par le fait que des fonctions sensiblement analogues sont remplies dans d'autres départements par des médecins-chefs qui sont des praticiens et dont le statut, déterminé par les règlements, ne leur confère pas la qualité d'employés de l'hôpital. (Quoi qu'il en soit, il semble que cette partie de ses fonctions soit surajoutée à son obligation de fournir des services professionnels, qui est l'obligation principale du contrat et celle en contrepartie de laquelle est versée la rémunération.) D'autre part, on met à la charge de l'appelant cette obligation, primor-diale dans le contrat, d'assurer en permanence l'exécution du travail radio-logique professionnel de l'hôpital, qu'il soit ou non capable de l'assurer personnellement, et quel que puisse être éventuellement le volume de travail. Cette obligation envisage de toute évidence une situation dans laquelle l'appe-lant devrait retenir les services d'un ou de plusieurs autres radiologues, non seulement en cas d'urgence ou pour des périodes temporaires, mais de façon permanente. Je vois , non seulement une «faculté» laissée à l'appelant, mais une obligation pour lui de faire exécuter par quelqu'un d'autre le travail prévu au contrat, dans certaines circonstances. Dans l'affaire Ready Mixed Concrete (South East), Ltd. v. Minister of Pensions and National Insurance 3, le juge MacKenna a déclaré (page 440). Le préposé doit être obligé de fournir son propre travail et ses compétences. La faculté d'effectuer un travail soit personnellement soit par une autre personne est incompatible avec un contrat de travail, bien qu'un pouvoir de délégation occasionnel ou limité ne le soit pas forcément... Bien que, durant les années visées en l'espèce, l'appelant ait effectué le travail en question comme s'il était normalement tenu de fournir son propre travail et ses compétences pour l'exécution de la tâche prévue, il faut qualifier le contrat d'après ce qu'il contient et eu égard aux différentes situations auxquelles il peut éventuellement s'appliquer. Avec beaucoup d'hésitation, notamment en raison du fait que, durant ces années, l'appelant a effectué son travail exactement comme il l'aurait fait s'il avait été un employé, je conclus qu'il le faisait en vertu d'un contrat de louage de services, et qu'il n'était par conséquent ni fonctionnaire ni préposé. La rémunération de l'appelant en vertu du contrat était donc le revenu qu'il tirait d'une entre-prise, selon la définition de ce terme à l'article 139(1) e) de la Loi de l'impôt sur le revenu: 139. (1) Dans la présente loi, * * * 3 [1968] All E.R. 433.
156 ALEXANDER v. M.N.R. [1970] EX.C.R. e) 'entreprise» comprend une profession, un métier, un commerce, une fabrication ou une activité de quelque genre que ce soit et comprend une initiative ou affaire d'un caractère commercial, mais ne comprend pas une charge ou emploi; Bien que je n'aie pas ici à rendre une décision sur cet appel en fonction de la loi, je ne peux m'empêcher d'exprimer une certaine satisfaction à la pensée que la conclusion à laquelle je suis parvenu permet à l'appelant de déduire les dépenses engagées pour s'assurer un revenu qui, autrement, n'auraient pu être déductibles, étant donné la rigueur de l'article 5 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Ayant ainsi conclu quant à la question principale, il me reste à considérer l'accord des parties, conclu par leurs avocats (Agreement of Parties by their Counsel), qui est l'un des documents produits dans l'instance. Le paragraphe 2 de cet accord précise que: 2. Si cette Cour conclut que le revenu de l'appelant pour les années 1964 et 1965 est un revenu provenant de l'exploitation d'une entreprise, les parties conviennent que les cotisations doivent être renvoyées au ministre du Revenu national pour plus ample étude et nouvelle cotisation, en fonction de cette conclusion. Dans le cas elle soutiendrait cette thèse, la Cour devra aussi déter-miner si les frais d'automobile entraînés par les déplacements de l'appelant entre son domicile et l'université Queen's, avaient lieu les séminaires, sont déducti-bles. Quoi qu'il en soit, si le revenu de l'appelant provient d'une entreprise, les parties conviennent que les frais d'automobile de l'appelant déductibles à ce titre ne comprennent pas les frais de déplacement de l'appelant entre son domicile et le Trenton Memorial Hospital, mais comprennent les frais d'automobile entraînés par l'accord de suppléance avec le Dr Richards, y compris l'allocation y afférente pour le coût en capital. Je dois donc statuer sur le point de savoir si les frais d'automobile entraînés par les déplacements de l'appelant entre son domicile et l'université Queen's, à Kingston, avaient lieu les séminaires, étaient des dépenses engagées pour assurer son revenu. D'après la preuve, je conclus que l'appelant a assisté aux séminaires une fois par semaine, pendant un semestre; il jugeait que cela lui était nécessaire pour se tenir au courant des développements de la science radio-logique, qui, à cette époque, subissait une évolution importante. Dans ces circonstances, les avocats de l'une et l'autre partie n'ayant découvert ni invoqué aucune jurisprudence applicable à l'espèce, je conclus que les frais de déplacement en question ont été encourus «dans le but de gagner ou de produire un revenu» de la profession de l'appelant, et qu'ils peuvent donc être déduits dans le calcul de ce revenu, nonobstant l'article 12(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il est donc fait droit à l'appel, avec dépens, et les cotisations sous ap-pel sont déférées à l'intimé pour plus ample étude et nouvelle cotisation, en consideration du fait que le revenu de l'appelant pour les années 1964 et 1965 provenait de l'exploitation d'une entreprise, et que les frais d'automobile entraînés par les déplacements de l'appelant entre son domicile et l'université Queen's, avaient lieu les séminaires, sont déductibles.
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